Edito
Le spectre des manifestations de rue
Pour permettre le déroulement normal des examens nationaux et le pèlerinage aux Lieux Saints de l’Islam, les Forces vives de Guinée ont cru devoir suspendre leurs manifestations pendant tout le mois de juin. Lors de l’assemblée générale hebdomadaire de l’UFDG qui s’est tenue le samedi 24 juin 2023, son vice-président chargé des Affaires politiques et électorales, Elhadj Bano Sow, a annoncé la reprise des manifestations de rue après le retour des pèlerins. Une annonce qui, pour des raisons évidentes, suscite beaucoup d’inquiétudes chez les pauvres citoyens épris de paix.
A l’avènement du CNRD au pouvoir, dans les circonstances que l’on sait, beaucoup ont pourtant pensé que les manifestations violentes seraient dorénavant un lointain souvenir pour les Guinéens. Mais hélas, en juillet 2022, l’on s’en souvient, des manifestations violentes, à l’appel du FNDC, ont été enregistrées dans certains quartiers du Grand Conakry. Il y a eu à nouveau des cas de morts, des journalistes agressés, et des destructions de nombreux biens publics et privés, principalement sur l’axe Hamdallaye-Kagbelen en passant par Bambeto, Cosa, Enco 5, Sonfonia, T8, Cimenterie et Bailobaya. Cette année encore, l’on a déploré beaucoup de morts lors des manifestations sociopolitiques dans le pays.
A qui profitent donc ces manifestations violentes dans la capitale guinéenne ? C’est la pertinente question que beaucoup se posent.
Les Guinéens de tous les bords devraient se donner la main et se mettre d’accord sur l’essentiel. A sa prise du pouvoir, l’actuel locataire du Palais Roi Mohammed V a clairement promis à ses compatriotes la refondation de l’État et la rectification institutionnelle. Il a posé à ce jour des actes qui sont diversement appréciés. La justice a été annoncée comme la boussole pour tout le monde, même si au fil des mois, nombreux sont ceux qui se disent déçus par rapport à la conduite des affaires judiciaires. La CRIEF est en train de poursuivre des cadres qui se sont rendus coupables de crimes économiques dans l’exercice de leurs fonctions sous Lansana Conté et Alpha Condé. Des poursuites que d’aucuns assimilent à des règlements de comptes. Il y a aussi les opérations de récupération des biens et domaines de l’État aussi bien à Conakry que les centres urbains de l’intérieur. Un chronogramme de 24 mois (à partir de janvier 2023) a été arrêté avec la CEDEAO.
Les manifestations violentes, pour quelque raison que ce soit, les Guinéens n’en ont plus besoin. Il faut cultiver la paix et l’entente. Personne n’a intérêt à ce que cette transition échoue. Que tous les acteurs sociopolitiques et les autorités de la transition acceptent de s’asseoir autour de la table pour discuter, sans passion et sans arrière-pensées, des sujets d’intérêt national pendant cette transition que tous les Guinéens veulent apaisée et consensuelle. A rappeler que pendant les onze ans de présidence d’Alpha Condé, la Guinée a enregistré des centaines de manifestations, avec un lourd bilan humain.
Aminata Camara